Madame Mohr a disparu

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Maryla Szymiczkowa (nom de plume du duo d’auteurs Jacek Dehnel et Piotr Tarczinsky)
Traduction Marie Furman-Bouvard
Paru chez Agullo

Cracovie, 1893. Zofia Turbotyńska, sans enfants, mariée à un professeur d’université, s’efforce de gagner sa place dans la haute société cracovienne. Dans ce but, et pour lutter contre l’ennui de sa vie domestique, elle s’engage au service d’une cause caritative : la Maison Helcel, maison de soins privée pour les malades et les vieux. Lorsqu’une résidente, Mme Mohr, est trouvée morte dans le grenier, le médecin conclut à une crise cardiaque. Mais Zofia, grande lectrice de romans policiers, y voit aussitôt un acte criminel et décide d’enquêter.

Les cosy mysteries sont très en vogue depuis quelque temps. Cet engouement est facile à comprendre : il s’agit de livres assez courts, faciles et agréables à lire et faisant souvent partie d’une série au plus ou moins long cours, ce qui permet de s’attacher au personnage principal. Ce fantastique cosy (et non cosy fantastique, nuance qui a son importance) se déroule dans la bonne société cracovienne de 1893 et tout comme la danse du même nom, son tempo tranquille au départ, devient ensuite de plus en plus vif…

Les auteurs croquent avec délectation cette société polonaise d’un 19e siècle vieillissant mettant en scène une galerie de personnages hauts en couleur. Zofia bourgeoise pleine d’ambition et piètre poète qui mène son petit monde (et au-delà) à la baguette est au centre de l’action, accompagnée de rôles secondaires intéressants.

On plonge avec délices dans la grande vie du Cracovie de l’époque, où le monde est si petit, au rythme de ses temps forts historiques : l’inauguration du nouveau théâtre de Cracovie, les obsèques du grand peintre Jan Matejko…
C’est là que réside d’ailleurs la force de ce roman. Le contexte historique est passionnant et parfait pour accueillir notre intrigue. L’ambiance est bien posée et représente une originalité singulière au regard de la plupart des cosys. Par ailleurs, la satire de la société bourgeoise polonaise ajoute encore au plaisir de lecture. N’ayant pas cette culture, on passe certainement à côté de sous-entendus ou traits d’esprits mais qu’importe, le ton est résolument ironique et c’est bien agréable. Les auteurs jouent à fond la carte du second degré et de la dérision et cela fonctionne parfaitement.

Zofia devient au fil des pages une héroïne très convaincante dans son nouveau rôle, digne des plus grands enquêteurs de polars littéraires (une petite pensée pour Miss Marple), donnant envie de prolonger l’aventure avec les prochains tomes à venir. L’enquête elle-même est suffisamment étoffée et habilement construite pour rester intéressante jusqu’au bout. J’ai toutefois regretté que les révélations finales ne soient pas mieux distillées en amont. Elles le sont bien sûr, sinon l’enquête ne fonctionnerait pas, mais pas assez à mon goût.
Il s’agit d’une lecture légère, rythmée, amusante très sympa, qui place la barre assez haut dans le milieu du cosy.

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