Category Archives: Albums jeunesse

L’Enfance des méchants, des vilaines et des affreux

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Texte Sébastien Perez
Illustrations Benjamin Lacombe
Paru chez Margot

Le grand méchant loup, la fée Carabosse, le capitaine Crochet, la Reine de coeur, Dracula, Barbe bleue… A travers dix-sept portraits, Sébastien Perez et Benjamin Lacombe imaginent l’enfance de célèbres méchants de la littérature jeunesse, avec en tête cette question : comment sont-ils devenus “méchants” ?

Il ne s’agit pas d’un album jeunesse destiné aux plus jeunes car le texte est long et dense, mais plutôt aux lecteurs en herbe. L’auteur nous présente ici toute une brochette de vilains et de vilaines qui deviendront par la suite les affreux méchants que nous connaissons (peut-être, certains étant plus connus que d’autres). L’idée est ici de remonter aux origines…

L’idée de départ est très sympa (le méchant est un personnage fascinant en soi) mais quitte à réinventer l’enfance de ces personnages, j’aurais aimé que les textes aillent plus en profondeur, au lieu de rester généraux. C’est vraiment dommage de ne pas avoir pris plus d’espace pour explorer cette sympathique idée. Enfin, il m’a manqué un fil rouge entre les différents portraits qui ont toutefois le mérite d’être très variés.

Les illustrations qui accompagnent les textes sont magnifiques, elles rendraient presque ces vilains et vilaines beaux, c’est dire ! Les couleurs sont superbes et le grand format rend justice aux illustrations pleine page.

Pour terminer, les quelques pages de la fin, permettant d’établir un parallèle entre l’enfant et le personnage adulte sont géniales et totalement bienvenues.

Un meilleur meilleur ami

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D’Olivier Tallec
Paru chez L’Ecole des loisirs

Ce matin, en me promenant, j’ai trouvé un meilleur ami. Enfin Je crois. En tout cas, ça y ressemble beaucoup.
Ça fait très longtemps que j’en cherche un.

Cette série d’albums, mettant en scène un écureuil extra, sonne souvent juste.
Une fois encore, Olivier Tallec a su proposer un album court, simple, mais plein de sens et de sensibilité, qui invite à se questionner sur l’amitié.
Un album qui tombe à pic en cette période de rentrée scolaire, avec les nouvelles amitiés qu’elle peut induire…
Tout d’abord, je tiens à saluer l’humour, excellent, qui reste très présent. Le ton est léger, amusant, ça se lit facilement. Les illustrations complètent parfaitement le texte et emmènent le lecteur encore un peu plus loin. Cette place importante donnée aux illustrations est bien dosée car les personnages sont très expressifs et attachants, renforçant ainsi le propos qui est amené avec une grande délicatesse visuelle (et une grande délicatesse tout court).
L’ambiance est quant à elle toute douce, c’est vraiment agréable…
Un meilleur meilleur ami est la promesse d’un bon moment de lecture. L’essayer c’est l’adopter !

Le secret des sables

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De Levi Pinfold
Paru chez Kaléidoscope

Une petite fille et ses trois frères. Un hôtel fantomatique, perdu au milieu du désert. Un puissant enchantement. Un mystérieux secret…

Voici un album pour les un-peu-plus-grands totalement atypique.

Tout d’abord pour ses illustrations rétro. Des images réalistes et audacieuses, qui saisissent le lecteur et l’emportent dans cette aventure imaginaire. Le trait fin, les grandes mises en page, les illustrations épurées et les couleurs assez froides suggèrent une certaine forme d’attente, un univers sans âge pas vraiment bienveillant. Tout semble figé dans cette immensité perdue au milieu de nulle part.

Le scénario n’est pas en reste et bascule rapidement dans le fantastique, avec une situation qui n’est pas sans évoquer Oz ou Chihiro… Le personnage principal, la seule fille, est intelligente et altruiste. Elle ne cède pas aux sirènes, contrairement à ses frères, tout comme sa mère avant elle. S’agit-il d’une sorte de flambeau féminin à se transmettre ? On ne saura pas. Cette histoire étrange conservera secrètes les intentions de l’auteur. Il n’en demeure pas moins que l’ambiance est envoûtante et qu’il s’agit d’une aventure extraordinaire forte en émotion, qui se lit et se partage avec plaisir. Un peu dérangeante, un peu étrange… elle ne laissera aucun lecteur indifférent !

Tout près de toi

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De Mark Janssen
Paru chez Kaléidoscope

« Chaque fois que tu te sentiras triste de ne plus me voir, je serai là. Tout près. » Depuis que sa grand-mère est partie, Babou la cherche désespérément. Qu’a-t-elle bien pu vouloir lui dire ?

Très bel album sur le thème du deuil.
L’histoire s’appuie sur de grandes illustrations en noir et blanc, qui reflètent bien la détresse de Babou face au décès de sa grand-mère. Et pourtant elles n’ont rien de triste. Elles fourmillent de détails, embarquant le lecteur dans le monde intérieur et les ressentis du personnage. Un décor extraordinaire qui apporte poésie, sensibilité et beaucoup de sérénité.
Le texte, tout en pudeur et en retenue, est quant à lui très touchant. On accompagne Babou dans le cheminement de son deuil, avec une histoire sans artifices, qui va à l’essentiel, en douceur.
Mark Janssen est assurément un auteur illustrateur à suivre. Merci pour cette superbe pépite !

La soupe Lepron

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De Giovanna Zoboli et Mariachiara Di Giorgio
Paru chez Les fourmis rouges

Quand un lièvre, victime du succès de sa merveilleuse soupe de légumes, se frotte aux rouages de la production à grande échelle et oublie l’essentiel.
M. Lepron, un beau lièvre au pelage brun et soyeux, a une passion : les légumes qui poussent dans le potager du fermier voisin. Avec ces fabuleux légumes, M. Lepron fait la meilleure soupe du monde. Peu à peu, la notoriété de la soupe de M. Lepron dépasse son terrier. Bientôt le monde entier l’adore ! Submergé par le succès, M. Lepron ouvre alors une grande usine pour pouvoir servir tout le monde…

Voilà un bel album ! Les illustrations sont splendides (quelle couverture !!!!!), avec un look rétro vraiment réussi, parfait pour prôner les vertus d’une soupe de grand-père, faite “à l’ancienne” avec amour.
Le texte est tout aussi beau. Assez poétique sans en faire trop, bien écrit et fignolé dans les coins, il traite par ailleurs un thème intéressant et résolument d’actualité : le capitalisme, la mondialisation et par extension la surconsommation (et surproduction). Le message passe bien. Il est délivré clairement mais sans ostentation.
Une belle réussite à tous points de vue !

Comment apprivoiser une grenouille

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De Rudy Spiessert
Paru chez l’Ecole des loisirs

Alors comme ça tu veux une grenouille, mon petit Clément ? Tu as raison, c’est un animal charmant. Pour l’approcher, chante-lui une chanson. Tu chantes comme une casserole ? Prends des cours chez un lutin des montagnes. Ils sont méfiants ? Captures-en un ! Mais attention aux ours à moustaches… Bon, d’accord, apprivoiser une grenouille, c’est pas du gâteau, mais au bout de tes épreuves, il y aura peut-être une récompense. Ou un bisou.

Avec un point de vue original via un échange entre Clément, le personnage principal et une voix off qui se pose en mentor, cet album relate la quête du graal, pardon de la grenouille. Le jeune garçon cherche en effet à se procurer une grenouille comme animal de compagnie sur les conseils plus ou moins avisés du narrateur. Les conseils en question sont plutôt farfelus, jouant avec les codes du conte, et amènent leur lot de rebondissements. Le point fort de cet album réside dans le fait que l’on va toujours de l’avant. Tout ne se passe pas comme prévu ? Tant pis, on va faire autrement ou contourner l’obstacle. Cela finit par nous mener à une situation abracadabrantesque que l’humour omniprésent et le ton tout en légèreté ne feront que renforcer.
Idéal en lecture partagée, cet album enchantera les enfants dès 5-6 ans (et au-delà !).

Cette maison est hantée

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D’Oliver Jeffers
Paru chez Kaléidoscope

Bonjour, entre donc.
Tu pourrais peut-être m’aider ? Vois-tu, il paraît…
que cette maison est HANTÉE !

Cet album propose une expérience conceptuelle. Ici nous ne suivrons pas une histoire à proprement parler, mais ferons plutôt connaissance avec les fantômes, leurs habitudes et leur mode de vie.
Les fantômes surgissent dans le décor grâce à un ingénieux système de calques. On peut lire le texte qui accompagne chaque planche avant ou après, selon l’effet souhaité. Pour ma part, j’ai choisi de positionner les calques après la lecture du texte, afin de ménager le petit effet de suspense et humoristique apporté par le texte, puis de profiter du décalage entre le texte et l’image avec calque. Cela fonctionne très bien.
La propriétaire de la maison cherche les fantômes mais ne les voit pas. Elle associe le lecteur à sa recherche, ce qui est très sympa et permet une lecture immersive. D’autant plus que le lecteur dispose des deux points de vue : la propriétaire qui n’y croit pas trop d’un côté et les fantômes plutôt facétieux de l’autre.
C’est une lecture amusante, qui fait son petit effet !

Un grand méchant loup !

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De Geoffroy de Pennart
Paru chez Kaléidoscope

Igor n’avait jamais imaginé être un jour en haut de l’affiche… et pourtant ! Lorsqu’un zigoto en costume sonne à sa porte pour lui proposer d’être la vedette du prochain film du grand réalisateur Otto Karskholer, Igor reste pantois. Mais pourquoi lui ? Il ne connaît rien au cinéma !

L’auteur nous avait déjà régalés il y a quelques années avec Igor et les trois petits cochons. Il revient ici sur ce thème par un autre biais.
Igor, bien que sollicité et n’y croyant pas lui même, est mis à l’épreuve par le réalisateur Otto Karskholer. Il doit montrer qu’il peut être un vrai grand méchant loup. Il doit convaincre pour obtenir le rôle dans le film du Loup et des trois petits cochons. Au fur et à mesure, Igor qui est pourtant un loup mesuré, élégant et bien élevé, sent la moutarde lui monter au nez. Et lorsqu’on le prive du dîner promis, il pète un câble. Car il y a toujours un loup redoutable qui sommeille au fond des loups bien élevés.
L’album est très drôle, avec de multiples clins d’oeils et détournements humoristiques liés au cinéma et aux contes, qui surprennent et amusent le lecteur. Le scénario est court mais travaillé, très fluide et dynamique.

Ohé Jimmy

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D’Anna Walker
Paru chez Kaléidoscope

Le papa de Jack a recueilli chez lui un perroquet égaré. Un oiseau bavard, drôle et irrésistible mais… qui prend beaucoup de place et fait beaucoup de bruit. Jack le trouve un peu envahissant.
Et si cet intrus le remplaçait dans le coeur de son papa ?

Un album de grande taille aux couleurs toutes douces, pour une histoire simple et tendre.
Tout en délicatesse, le texte introduit la jalousie insidieuse de Jack à l’égard du perroquet, sans toutefois la nommer. Le lecteur devra la reconnaître et l’identifier par lui-même.
Pourtant, Jack partira à la recherche du perroquet envolé, pour ne pas peiner son papa avec la disparition de celui-ci… Quant au papa, c’est à la recherche de Jack qu’il partira, remettant ainsi les pendules à l’heure.
La relation père-fils de ce récit, bien qu’imparfaite est remplie de tendresse. C’est un bel album signé Anna Walker.
Cette histoire touchante saura parler aux enfants autant qu’à leurs parents, faisant vibrer plusieurs cordes sensibles.

J’aurais voulu

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D’Olivier Tallec
Paru chez l’Ecole des loisirs

Je ne veux plus être un écureuil. Plus jamais !
D’ailleurs personne ne rêve de devenir un écureuil.
Si on m’avait demandé mon avis, j’aurais choisi autre chose.

Après C’est mon arbre et Un peu, beaucoup, nous retrouvons notre (tellement) mignon petit écureuil. Cette fois, il se pose des questions vraiment existentielles. Être un écureuil, c’est nul et ennuyeux, l’herbe est certainement plus verte ailleurs, cela ne fait aucun doute.

Nous allons donc accompagner l’écureuil dans sa quête identitaire. Ce n’est pas simple car les choses ne sont pas forcément telles qu’on les pense/rêve et surtout aucune situation n’est malheureusement idyllique. Il devra apprendre à faire la part des choses, à peser le pour et le contre, à s’accepter tel qu’il est.

Encore une fois, les images aux couleurs automnales sont vraiment sympas et expressives. L’humour est omniprésent et apprécié. Le texte est quant à lui court mais fait mouche à chaque fois.


C’est donc une nouvelle réussite pour cette série qui peut tout à fait se lire indépendamment.