Monthly Archives: April 2021

Voyage à Birmingham

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De Christopher Paul Curtis
Traduit de l’américain par Frédérique Pressmann
Paru chez l’Ecole des loisirs

La vie quotidienne de la famille Watson, dans l’état du Michigan au début des années 60, est celle d’une famille noire des plus normales, avec son lot de bons souvenirs, de chamailleries, de projets raisonnables et de serrages de vis. C’est l’été 1963. Dans le Sud, le mouvement pour les droits civiques bat son plein, les foules noires protestent pacifiquement contre la ségrégation, les racistes ripostent en posant des bombes jusque dans les églises. C’est l’été 1963. Il fait chaud. Dans quinze jours, le 15 septembre, Martin Luther King prononcera son immortel discours : ” J’ai fait un rêve…”

Un thème et une ambiance originaux pour ce roman jeunesse. Il est assez rare de trouver des livres sur la vie en Amérique dans les années 60 et plus particulièrement avec des personnages principaux noirs. Dommage que le concept n’ait pas été poussé jusqu’au bout car si la quatrième de couverture met l’accent sur la ségrégation, elle n’est pas vraiment au cœur du récit, à part à la fin et encore, l’émotion n’est pas assez au rendez-vous. Sans sombrer dans le pathos, l’explosion de la bombe dans l’église aurait mérité plus de place il me semble, place qu’elle occupe d’ailleurs dans la quatrième de couverture. Le lecteur restera donc sur sa faim s’il cherche un livre sur la ségrégation.
En revanche, le quotidien dans ce contexte que nous ne connaissons pas ou peu et la vie de cette famille peu aisée (peu importe qu’elle soit noire, blanche, verte ou bleue) sont très intéressants. Le ton est léger et drôle et les personnages plutôt attachants, offrant ainsi une lecture agréable et dépaysante, avec une touche d’émotion sur la fin lorsque la fratrie se ressoude.
Bilan, même si ce roman ne joue pas forcément sur le terrain que l’on attendait, il n’en reste pas moins une très bonne lecture.

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De Paul Auster
Traduit de l’américain par Gérard Meudal
Paru chez Actes sud

Le premier roman de Paul Auster en sept ans. Une architecture narrative inédite. Une expérience de lecture inoubliable.
Un roman-kaléidoscope où un personnage, Ferguson, incarne toutes les figures du destin protéiforme que le monde et l’Amérique des années 1950 furent susceptibles de proposer à l’individu, de l’enfance à l’entrée dans l’âge adulte. Tout en restant fidèle aux obsessions littéraires qui sont les siennes, Paul Auster, avec cet ambitieux et ample nouveau roman, renouvelle et détourne brillamment le genre du roman initiatique en le confrontant à l’Histoire du XXe siècle.

Je me méfie toujours des écrivains encensés et des romans plébiscités… De plus, celui-ci est tout de même un sacré pavé pour “tenter l’expérience”. Mais le thème, l’Amérique des années 50 à 70, et les destinées parallèles ont de quoi motiver une lecture.
Il faut un petit temps d’adaptation pour se faire au “concept” de ce livre. Il y a plusieurs histoires en parallèle avec le même personnage principal mais elles sont en fait mélangées, ce qui exige une bonne dose de concentration de la part du lecteur, d’autant que du coup il y a beaucoup de redites (qui n’en sont pas vraiment, vous l’aurez compris) et de longueurs alors qu’on aimerait quand même avancer un peu dans l’histoire. C’est parfois un peu hard psychologiquement et pas évident de repartir sur la suite d’une histoire qui a entretemps connu d’autres développements.
Par contre il faut reconnaître que c’est une fresque sociale très intéressante et une fois passé le premier tiers, cette lecture vaut vraiment la peine de s’accrocher. Chacune des vies de Ferguson permet d’ajouter des détails sur les événements et/ou de les éclairer sous un nouveau jour. C’est absolument passionnant et, du coup, très complet.
Évidemment, c’est une lecture longue et pas très “abordable”, mais une fois lancé, ça passe bien et je suis contente de l’avoir lu…

Les renards de Londres

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Eugène Green
Paru chez l’Ecole des loisirs

Chassés des forêts où ils vivaient depuis des siècles, les renards se sont réfugiés à Londres, dans les parcs de la famille royale. Ils ont beau mener une existence modeste et discrète, ils sont traités en criminels et traqués sans répit. Quand le prince consort décide d’organiser une chasse à courre, les renards entrent en résistance. Déterminés à prouver aux humains qu’ils valent mieux qu’eux, ils décident de faire la Révolution.

Avec sa couverture printanière toute douce, les personnages renards et son côté très élégant, on ne sait pas trop où ce roman va nous emmener : un conte du terroir, une mignonne histoire d’animaux ? Pas du tout ! Il y est question d’une révolution !!! Celle des renards, qui d’abord chassés de leur campagne, sont ensuite pris pour cible en ville, puis dans les jardins royaux. Au bout d’un moment, trop c’est trop, les renards  entrent en résistance (sans prendre le maquis puisqu’ils y sont déjà) et les humains vont voir de quel bois ils se chauffent.

Un petit roman qui ne paie pas de mine mais qui manie avec efficacité l’humour anglais et s’offre le luxe d’aborder l’air de rien des sujets délicats comme les inégalités sociales et l’impact de l’Homme sur la Nature et ce, de façon très convaincante. On notera par ailleurs au passage que la reine gèrera cela de main de maître (et avec droiture), contrairement aux hommes de son entourage.

Une lecture agréable et amusante à mettre entre toutes les mains.

La trilogie de la poussière, tome 1 La belle sauvage

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De Philip Pullman
Traduit par Jean Esch
Paru chez Gallimard

À l’auberge de la Truite, tenue par ses parents, Malcolm, onze ans, voit passer de nombreux visiteurs. Tous apportent leurs aventures et leur mystère dans ce lieu chaleureux. Certains sont étrangement intéressés par le bébé nommé Lyra et son dæmon Pantalaimon, gardés par les nonnes du prieuré tout proche. Qui est cette enfant ? Pourquoi est-elle ici ? Quels secrets, quelles menaces entourent son existence ?Pour la sauver, Malcolm et Alice, sa compagne d’équipée, doivent s’enfuir avec elle. Dans une nature déchaînée, le fragile trio embarque à bord de La Belle Sauvage, le bien le plus précieux de Malcolm. Tandis que despotisme totalitaire et liberté de penser s’affrontent autour de la Poussière, une particule mystérieuse, deux jeunes héros malgré eux, liés par leur amour indéfectible pour la petite Lyra, vivent une aventure qui les changera pour toujours.

Je voulais le lire depuis un moment.
Cette sympathique préquelle est bien équilibrée, avec son intrigue propre même si les prémices des Royaumes du Nord y sont posées. Il y a d’ailleurs énormément d’élément intéressants, en rapport avec la saga.

Les personnages sont très sympas, avec de belles personnalités.
L’univers reste riche et les pointes de fantastique sont parfaitement intégrées.
Le rythme y est à la fois tranquille et soutenu (oui, c’est étrange comme formulation, je sais, et pourtant c’est tout à fait ça : il se passe plein de choses mais malgré tout on prend le temps et l’intrigue principale n’est pas extrêmement fournie), avec un peu de suspense. Toutefois, après avoir pris le temps de dérouler l’histoire, le dénouement est bien trop rapide. D’un coup, pouf, tout est fini et forcément, c’est un peu frustrant…
Malgré ces petites faiblesses, La belle sauvage n’en reste pas moins un roman très agréable.